Happy Together de Wong Kar-wai
Filmographie
 

 

Happy Together

Interprètes :

Leslie Cheung
Tony Leung
Chang Chen

durée: 93 minutes
sortie française: decembre 1997


fiche technique

 

 

 



Deux hommes, deux amants, quittent leur pays, Hong Kong et s'exilent en Argentine. Ils voyagent avec un seul but: voir les chutes d'eau d'Iguacu.
Ils se sépareront dans cette errance en terre étrangère. L'un survivra en trouvant des petits jobs. Histoire de garder une certaine stabilité. Il tentera de nouvelles approches. Obsédé par Hong Kong.
L'autre aura une vie plus mouvementée, gigolo, et sans attache. Perdu. Ils se retrouveront. Et tenteront de refaire leur vie ensemble. De chercher le bonheur ensemble. Encore faut-il être heureux.

 

Happy Together, valut à Wong Kar-wai le prix de la mise en scène au festival de Cannes en 1997. Au départ il s'agissait d'adapter le roman The Buenos Aires Affair de Manuel Puig mais au final il n'en reste rien et il s'agit bel et bien d'un scénario original. Le film rejoint la thématique centrale de l'œuvre du réalisateur : les histoires d'amour, mises à mal par les petits tracas de la vie. Le film conte l'histoire de deux amants (Tony Leung et Leslie Cheung) qui partent pour Buenos Aires afin de repartir à zéro. Une histoire d'amour qui n'en finit pas de se terminer.



Tony Leung et Leslie Cheung


Happy Together n'est pas d'un film sur l'homosexualité, ce thème n'est traité ni sous un point de vue critique, ni sous une forme moraliste. Les deux héros sont gays, un point c'est tout. Ce détail n'a finalement que peu d'importance :
Ce film n'est pas seulement sur deux hommes mais sur la relation humaine, la communication humaine et les moyens de la maintenir ; c'est deux hommes mais ça pourrait être n'importe quel autre couple.A Hong Kong, certains films avaient déjà traité de l'homosexualité mais sous l'angle de la comédie. Je ne voulais pas faire une comédie, je ne voulais pas faire rire le spectateur. Pour moi l'homosexualité c'est comme l'Argentine, c'est de l'autre côté de la planète, mais ce sont deux sujets intéressants."





La version initiale durait 3 heures et comportait des scènes où apparaît la chanteuse Shirley Kwan qui furent coupées au montage final mais intégrées dans Buenos Aires Zero Degree, un film monté par Kwan Pun-Leung à partir des rushes du film et dont j'ignore s'il est finalement sorti.

"Au départ Happy Together durait 3 heures. Pour moi, le montage est un procédé de destruction. J'ai dû enlevé des scènes que j'aimais, j'ai donc détruit mon film au lieu de le monter. Par exemple, tout le passage avec la jeune fille qui rencontre par accident Lai a entièrement été coupé, cela déstructurait trop à la fin. Même si j'écris mon histoire avec un stylo et un papier pour savoir où elle m'emmène, je fonctionne dans un processus global qui se termine au montage."



Bien qu'en apparence assez mince, le scénario est cette fois bien plus linéaire que dans ses précédents films. Tout l'art de Wong Kar-wai est dans la manière de raconter, dans un style qui rend beau tout ce qu'il filme et cette capacité de créer un univers avec trois fois rien : "Notre style n'a pas de considération esthétique. Notre style ce sont les contraintes qui le créent. Peu d'argent, peu de temps pour filmer dans les lieux publiques."

D'un point de vue esthétique, Happy Together est sans doute le film le plus abouti de Wong Kar-Wai. Le travail effectué avec son chef opérateur, Christopher Doyle (sans doute la véritable star du film) sur les couleurs est prodigieux. L'utilisation importante de filtres de couleurs et d'une pellicule 35 mm forcée et saturée donnent une texture particulière à chaque scène et aboutit à un film contemplatif et intimiste. Durant tout le film, ils alternent la couleur avec un noir et blanc granuleux.



"L'alternance de scènes en noir et blanc puis couleur est mon idée. Je voulais montrer l'hiver, le froid ainsi que les moments d'introspection des personnages. Lorsque que Wing dit à Fai " on recommence à zéro " la couleur s'installe. Cela appuie l'alternance des émotions des personnages."

La camera se fait tantôt virevoltante tantôt observatrice rêveuse. Ralentis et images accélérées font encore une fois des miracles (cf. la nuit qui tombe en accéléré sur Buenos Aires ). De nouveau, il s'aide de la voix off, celle de Tony Leung en l'occurrence, pour imposer son récit. Les silences sont nombreux mais le film déborde également de sons. Des bruits bien sûr, tel le fracas d'une bouteille sur une tête hors champ, mais essentiellement des musiques : un tango d'Astor Piazzola, Frank Zappa, des chansons pop américaines...

Happy Together est sans doute - avec Les Cendres du Temps - le moins accessible des films de Wong Kar-wai.

In The Mood for Wong Kar-wai - 2004